Le mouvement de désinvestissement qui touche le secteur des pétroles de roche aux Etats-Unis commence à prendre des proportions inquiétantes alors 32 milliards de dollars ont été sortis les six derniers mois.
C’est une mauvaise nouvelle pour l’économie américaine en général et pour le secteur de l’énergie en particulier. Près de 30 milliards de dollars de capitaux ont été retirés par les investisseurs du secteur du gaz de schiste sur le seul 1er semestre de l’année 2015. Pour avoir un point de comparaison, 30 milliards de dollars, c’est presque autant que l’ensemble des sorties de capitaux qui ont touché le secteur américain des gaz de schiste sur l’ensemble de l’année 2014 selon des données du cabinet FactSet, société multinationale de gestion de données financières
Fuite en avant
Un chiffre spectaculaire qui confirme une fuite en avant assez problématique pour une industrie dans une situation de plus en plus précaire. « Les marchés financiers étaient assez forts et ouverts pour les groupes pétroliers, ce qui a mené à un endettement colossal », estime un analyste américain. Selon le même cabinet, les dettes des entreprises américaines opérant dans les pétroles de schiste ont augmenté de 81 milliards de dollars à la fin de 2010 pour atteindre 169 milliards en juin 2015. De plus, les dépenses d’activité de ces sociétés en 2014 ont dépassés leurs revenus de 37,7 milliards de dollars.
Les sociétés qui ont multiplié les forages et les projets, alors que le baril était encore à 100 dollars l’année dernière, ont contracté pour des dizaines de milliards de dollars de prêts et de crédits auprès du secteur financier américain. Le gaz de schiste qui était censé devenir une manne pour le pays ressemble de plus en plus à une situation industrielle critique, doublé d’une bulle financière en cours d’explosion car ces créances sont désormais considérées comme quasiment toxiques, avec un baril qui chute de moitié.
La baisse du cours du pétrole comme explication
Il est vrai que le paramètre-clé, les prix du brut, a radicalement changé la donne. Quand une industrie aux lourds coûts d’investissement doit affronter une baisse de 50% de la matière première qu’elle travaille, cela provoque une série de transformations structurelles plus que nécessaires, d’autant que le pétrole de schiste est bien plus coûteux et cher à extraire que les gisements plus classiques. Un vrai dilemme pour l’Amérique qui est tiraillée entre un pétrole bon marché qui fait le bonheur des consommateurs et de certains secteurs d’activité, alors que tout le segment pétrolier, très large contributeur au PIB du pays, subit de plein fouet cette crise.
Mais même si le baril se stabilise autour des 40-50 dollars, cela ne permet pas d’assurer des socles de stabilité et encore moins de dégager des marges acceptables. Les groupes pétroliers, qui ont donc de plus en plus de mal à être rentables, n’hésitent plus à fermer des sites de forages. Sur un an, les producteurs ont réduit la voilure de 57%, avec même une accélération très notable depuis le mois de mai. Ainsi, s’ils ont vendu leurs émissions pour un montant de 10,8 milliards de dollars pour le premier trimestre 2015, cette somme est tombée à 3,7 milliards de dollars au deuxième trimestre. En juillet et en août, le volume d’émissions représentait moins d’1 milliard de dollars.
Du coup, énormément de sociétés de forage spécialisées sont à présent dans une situation financière déplorable. Depuis le début de l’année, six d’entre elles ont été obligées de se placer sous protection du Chapitre 11, la loi américaine sur les faillites. Ce qui pour les banques et les créanciers concernés constitue un nouveau fardeau de créances très à risques, à l’image des crédits sub-prime ou autres à l’heure où les banques américaines vont bientôt commencer une révision du prêt de base des sociétés pétrolières et gazières. Ainsi, il sera beaucoup plus compliqué de trouver des fonds.