La capitale nigériane souhaite que les bénéfices retirés par l’exploitation pétrolière et gazière par les grandes compagnies viennent alimenter des fonds permettant d’investir dans le développement de l’économie. Un projet de loi est en attente depuis 2008.
Le Nigeria, premier producteur africain de pétrole, veut relancer son projet de loi sur la réforme du secteur pétrolier, attendu depuis plusieurs années, pour accélérer son passage au Parlement et potentiellement débloquer des milliards de dollars d’investissements gelés. Ce projet, annoncé en 2008, traine à être mis en œuvre à cause de désaccords sur ses termes entre le gouvernement et les grandes compagnies pétrolières opérant au Nigeria.
Augmenter la part qui revient à l’Etat
Dans les grandes lignes, le PIB, Petroleum Industry Bill, prévoit de redéfinir les conditions fiscales d’exploitation dans le secteur pétrolier et gazier, afin d’augmenter la part qui revient à l’Etat nigérian, et de restructurer la Compagnie pétrolière nationale nigériane (NNPC). Selon ce texte, les sociétés pétrolières internationales devront aussi allouer 10% de leur bénéfice net à un fonds en faveur des régions productrices de pétrole et gaz.
« Le non-passage du projet de loi dans quelque forme que ce soit au fil du temps a créé un niveau d’incertitude auquel aucun investisseur international ne veut être confronté », a regretté Emmanuel Kachikwu, nouveau patron de la NNPC. Le Parlement doit travailler avec le secteur pour « faire passer les éléments du projet qui ne sont pas trop objets de litige », a demandé celui qui est pressenti pour devenir secrétaire d’Etat chargé du secteur pétrolier.
Le porte-parole de la NNPC, Ohi Alegbe, assure que le PIB est en train d’être peaufiné et devrait être soumis au Parlement en début d’année prochaine. « Le vice-président (Yemi Osinbajo) et M. Kachikwu ont promis que le PIB serait scindé. C’est nécessaire si nous voulons avancer », rappelle-t-il.
Une perte annuelle évaluée à 13,7 milliards d’euros
Emmanuel Kachikwu, ancien vice-président exécutif d’ExxonMobil Africa nommé en août par le nouveau président Muhammadu Buhari, a récemment assuré que le retard dans le passage du PIB était dommageable à l’économie. Le montant des « investissements que nous perdons en moyenne chaque année parce que le PIB n’a pas été mis en place dépasse les 15 milliards de dollars » (13,7 milliards d’euros), a récemment expliqué aux sénateurs M. Kachikwu.
Mais les grandes sociétés pétrolières rechignent à l’idée de voir leurs bénéfices réduits, se plaignant que les termes du PIB sont trop sévères et peuvent faire baisser les investissements. Du coup, des sociétés comme Shell, Total ou Chevron ont vendu des actifs au Nigeria ces dernières années tandis que les nouveaux investissements ont ralenti. Au plan interne, les régions qui doivent voir leurs revenus augmenter grâce au nouveau fonds se trouvent principalement dans le Sud pétrolifère, un fait qui crée des remords dans d’autres régions pauvres au nord du pays. Certains responsables politiques de ces régions, ont critiqué le PIB, qui selon eux risquait de les défavoriser davantage leur région d’autant plus que le Sud bénéficie déjà largement des revenus du pétrole.
Le Nigeria dépend à 70% de ses exportations de brut pour son budget et à 90% pour ses recettes en devises. Toutefois, la chute des cours pétroliers depuis la mi-2014 a causé une chute des revenus de 70%, affaiblissant la monnaie nigériane, le naira, et réduisant les réserves de devises.