La Commission européenne a présenté, le 16 février, ses mesures pour accroître la sécurité énergétique, travaux lancés en 2014 après les craintes de ruptures d’approvisionnement, liées à la crise ukrainienne.
Ce paquet de mesures définit un large éventail de mesures destinées à renforcer la résilience de l’Union Européenne aux ruptures d’approvisionnement en gaz », indique le communiqué de la Commission. Modération de la demande d’énergie, accroissement de la production énergétique en Europe, notamment à partir de sources d’énergie renouvelable, poursuite du développement d’un marché intérieur de l’énergie et diversification des sources d’énergie, des fournisseurs et des itinéraires d’approvisionnement font partie des mesures présentées.
Règlement sur l’approvisionnement en gaz
La Commission propose également un règlement sur l’approvisionnement en gaz qui vise à « passer d’une approche nationale à une approche régionale pour la conception des mesures destinées à renforcer la sécurité d’approvisionnement ». Un principe de solidarité entre Etats membres est introduit afin que les services sociaux essentiels et les ménages soient approvisionnés en cas de crise. Une décision permettra aussi à la Commission d’avoir un droit de regard ex ante sur les accords signés entre les Etats membres et les pays fournisseurs.
Car au fond, aujourd’hui, comment réduire sa dépendance énergétique ? Comment échapper au gaz russe ? Ce sont des questions auxquelles doit répondre aujourd’hui l’Union européenne. Aujourd’hui, l’Union Européenne reste « très vulnérable » énergétiquement. Elle importe en effet 53% de l’énergie qu’elle consomme, soit une facture de plus d’un milliard d’euros par jour. Cette dépendance est de 42% pour les combustibles solides comme le charbon, 62% pour le gaz et 88% pour le pétrole. La plus problématique, aux yeux de Bruxelles, est celle liée au gaz : 39% des importations européennes sont aujourd’hui fournies par le groupe Gazprom.
Pour contourner le géant gazier russe, la Commission européenne propose de se tourner vers le gaz naturel liquéfié (GNL), même s’il coûte plus cher. Le gaz naturel liquéfié représente aujourd’hui 10% des importations européennes, mais certains pays n’y ont pas accès, faute d’infrastructures adéquates. La stratégie de Bruxelles vise donc à encourager et cofinancer la construction des maillons manquants, notamment de nouveaux terminaux de GNL. Le gaz, « c’est l’énergie fossile la plus propre », a assuré le commissaire chargé du Climat et de l’Energie, Miguel Arias Cañete.
Vives critiques des verts et des ONG
Les plans de Bruxelles ont immédiatement fait réagir. Le moins que le puisse dire est que ces plans ne fassent pas l’unanimité. Pour les eurodéputés verts, la Commission fait le mauvais choix en se focalisant sur le gaz et « va à contre-courant de l’accord sur le climat conclu à Paris en décembre ». Spécialiste des questions d’énergie, l’élu écologiste Claude Turmes pointe l’erreur de Bruxelles, qui a basé sa stratégie sur une « estimation exagérée » de la demande en gaz. Ce qu’a d’ailleurs souligné récemment la Cour des comptes européenne. « La Commission va gaspiller des millions d’euros dans des projets voués à l’échec, c’est la porte ouverte à des terminaux et pipelines GNL inutiles », dénonce-t-il.
De leur côté, les ONG accusent la Commission d’être aveugle au potentiel des renouvelables et à celui de l’efficacité énergétique. « La proposition de Bruxelles va prolonger l’addiction de l’UE aux importations d’énergie », déplore Jiri Jerabek, le monsieur Énergie de Greenpeace. « Les plans de Bruxelles vont enfermer l’Europe dans des décennies d’utilisation d’énergie fossile, au lieu de basculer vers les renouvelables », ajoute Molly Wash, des Amis de la terre. Elle s’inquiète des effets induits par la construction de ces nouvelles infrastructures, estimant qu’elles pousseront, in fine, l’Europe à importer davantage, notamment des gaz de schiste.