La hausse de la demande mondiale de GNL, portée notamment par la volonté de l’Union européenne de se libérer de sa dépendance au gaz russe, pousse les pays producteurs en capacité d’augmenter leur production à le faire. Le Qatar avance ainsi notamment sur l’exploitation de North Field East, une extension du plus grand champ gazier du monde, partagé avec l’Iran. TotalEnergies a rejoint le projet mi-juin 2022, comme premier partenaire étranger.
L’Union européenne, dans sa volonté de se libérer de sa dépendance au gaz fossile russe, a multiplié depuis début mars 2022 les rendez-vous avec les pays producteurs de GNL, notamment au Moyen-Orient.
Dans le contexte de la crise ukrainienne, les pays producteurs de GNL accélèrent la valorisation de leurs réserves
Devant cet accroissement de la demande, dans un contexte de hausse des prix du gaz et de relâchement des contraintes imposées sur les nouveaux investissements dans les énergies fossiles, la plupart de pays disposant de réserves relancent ou accélèrent les travaux de valorisation de ses ressources – c’est notamment le cas d’Israël ou de l’Egypte.
Le Qatar, de son coté, avait déjà planifié des travaux pour étendre l’exploitation du champ gazier North Field (ou North Dome), considéré comme le plus grand gisement du monde, contenant environ 10 % des réserves mondiales de gaz. Mais le pays a décidé de se doter de partenaires étrangers pour ne pas perdre de temps.
North Field, le plus important champ gazier du monde, dans le Golfe Persique
Découvert en 1971, North Field est situé dans le Golfe Persique, à cheval entre les eaux territoriales de l’Iran et du Qatar. Coté iranien, des forages ont été mis en service entre 2003 et 2008, mais les travaux sont ralentis voire en sommeil depuis le début des années 2010, notamment à cause des sanctions internationales qui frappent le pays dans le cadre de son programme nucléaire.
Coté qatari, l’exploitation du champ gazier a commencé beaucoup plus tôt, dès 1988. Mais le pays a décidé de la ralentir, volontairement, pour faire durer les réserves le plus longtemps possible, et seule la moitié nord du champ gazier est actuellement exploitée.
Le Qatar veut augmenter la production de sa partie de North Field
Pour autant, à la fin des années 2010, le pays a décidé de programmer la mise en forage des parties Est et Sud de sa partie de North Field, via les deux projets North Field East et North Field South.
Développé par Qatargaz, une filiale du groupe public Qatar Petroleum, North Field East vise à augmenter la capacité de production de GNL du Qatar de 77 millions de tonnes par an (Mtpa) à 110 Mtpa d’ici 2025. North Field South devrait permettre d’ajouter encore 16 Mtpa d’ici 2027, pour porter la capacité de l’état gazier à 126 Mtpa à cette date.
Lancement du projet North Field East, pour augmenter la production de gaz et la capacité de liquéfaction
Le projet North Field East a été lancé en 2020, et comprend notamment un immense volet consistant à augmenter les capacités de liquéfaction de gaz naturel à Ras Laffan, terminal GNL de l’ensemble du pays, afin de les porter à 110 Mtpa d’ici 2025, et à 126 Mtpa d’ici 2027.
Le premier volet des travaux consiste à construire quatre méga-trains de GNL d’une capacité de 7,8 Mtpa chacun, qui s’ajouteront aux quatorze déjà en service. QatarEnergy a signé à l’automne 2020 des contrats avec divers fournisseurs pour l’extension de son usine de GNL.
Quatre nouveau méga-trains de GNL à horizon 2025
Baker Hughes s’est ainsi vu attribué la fourniture des quatre trains de compresseurs de réfrigérant principaux, via 12 turbines à gaz et 24 compresseurs centrifuges. Honeywell va fournir les logiciels d’automatisation et de contrôle des procédés industriels, ainsi que les solutions de cybersécurité. Air Products apportera ses équipements de liquéfaction du gaz naturel AP-X.
Ce 28 avril 2022, QatarEnergy a signé un contrat d’ingénierie, d’approvisionnement et de construction (Engineering, Procurement, and Construction, ou EPC) avec une coentreprise entre Técnicas Reunidas et Wison Engineering.
Le Qatar a également confié à cette même coentreprise un contrat à prix forfaitaire pour l’expansion des installations de manutention, de stockage et de chargement du soufre dans la zone industrielle de Ras Laffan.
Pour accélérer le processus, le Qatar ouvre 25 % du projet à quatre géants étrangers
Concernant le forage, North Field East comprendra 80 puits, et huit plateformes de tête de puits non-habitées. Le forage a commencé en mars 2020, et quatre plateformes sont installées depuis mai 2020.
A l’origine, le Qatar voulait financer ce projet seul, mais la nécessité de tenir les délais, pressés notamment par les dirigeants européens, a poussé l’émirat à proposer à des géants gaziers et pétroliers internationaux de participer, à hauteur de 25 % des 28 milliards de dollars de budget du projet. Quatre partenaires étrangers sont a priori attendus.
TotalEnergies premier partenaire officiel, en attendant Exxon, Shell et ConocoPhillips ?
Ce 12 juin 2022, le Qatar a annoncé la signature d’un premier partenariat international avec le français TotalEnergies. « Je suis heureux d’annoncer la sélection de TotalEnergies comme premier partenaire dans le projet North Field East », a ainsi déclaré le ministre qatari de l’Energie, Saad Sherida Al-Kaabi.
Le président de TotalEnergies, Patrick Pouyanné, a ensuite précisé que le groupe pétro-gazier français allait prendre une participation de 6,25% dans le projet dans le cadre d’une coentreprise avec QatarEnergy.
Selon Saad Sherida Al-Kaabi, d’autres accords devraient être annoncé prochainement, des sources proches du dossier estimant que les trois partenaires étrangers supplémentaires pourraient être l’américain Exxon Mobil, le britannique Shell et l’américain ConocoPhillips.